CODE ÉLECTORAL: LA PREMIÈRE ÉTAPE EST FRANCHIE



Le 5 juin prochain, le Comité de rédaction des textes fondamentaux présidé par le Pr. Mamoudou Gazibo sera en principe aux termes de ses travaux. Il aurait accompli sa mission en transmettant tous les principaux textes devant régir la 7ème République, à savoir la Constitution, le Code électoral, la charte des partis politiques, le statut de l’opposition… Pour l’instant, seul le code électoral a été transmis au CSRD et au gouvernement.
Ce nouveau texte avait été au centre d’une session extraordinaire du Conseil Consultatif National qui a clos ses travaux dimanche 23 mai 2010 après cinq jours d’intenses échanges. Le nouveau texte structuré en cinq (5) Titres, dix sept (17) chapitres et cent soixante et dix sept (177) articles, malgré quelques contradictions qu’il a soulevées au niveau du CNN, a fini par faire l’objet d’un consensus en attendant son passage au CSRD et au Conseil constitutionnel.
Les conseillers du Conseil Consultatif National qui se sont penchés sur l’avant projet du nouveau code électoral n’ont pas manqué d’apporter des retouches sur certains points, même si l’esprit d’amélioration et d’innovation de l’arsenal juridique qui a inspiré le Comité des textes Fondamentaux a été respecté. La Composition de la Commission Electorale Indépendante (CENI) revue par le CNN indique une plus large représentativité du genre, avec à tous les niveaux, la prise en compte de la composante féminine. Le président doit être un magistrat de siège de deuxième grade au moins élu par ses pairs ou une personnalité, reconnue pour son impartialité, sa compétence et son intégrité, nommé par le Président de la République. Le premier viceprésident doit aussi être un magistrat du siège de deuxième grade au moins élu par ses pairs dans le cas où le Président n’est pas un magistrat, ou un représentant de l’Ordre des Avocats du Niger. Le deuxième vice président sera quant à lui une représentante des collectifs des associations féminines légalement reconnues. Les deux rapporteurs qui seront désignés au sein de la CENI seront l’un, des Associations de défense des droits de l’Homme et/ou de promotion de la démocratie et le 2ème, le représentant de l’Etat. Il faut dire aussi que la CENI renfermera un représentant du Haut Conseil des Nigériens à l’extérieur (HCNE). Le point d’achoppement de cette session extraordinaire du CCN a été le serment confessionnel.
Extirpé par le Comité des textes Fondamentaux en raison de son incompatibilité avec le caractère non confessionnel de l’Etat et de sa non conformité à la Constitution, le serment confessionnel pour les principaux responsables de la CENI sera défendu par une importante frange des conseillers du CNN. Les divergences à ce sujet conduiront le président du CCN, Marou Amadou à faire recours au vote. Le duel donnera 43 voix qui se sont exprimées favorables à la réintroduction du serment confessionnel et 36 contre. Reste à savoir si le Conseil Constitutionnel, dernière instance à apprécier sur la question jugera ce serment conforme à la toute prochaine Constitution qui est encore en rédaction. Il faut dire que le serment confessionnel a été, depuis son introduction dans l’arsenal juridique de notre pays, un point de discorde entre les magistrats et la Commission électorale. Depuis 1999, le Syndicat Autonome des Magistrats du Niger (SAMAN) boycotte la CENI lors des scrutins, estimant que ses membres sont déjà assermentés.
L’innovation, portant sur la création d’un comité national de gestion et de conservation du fichier électoral comme structure permanente intégrée au secrétariat général permanent de la CENI a été maintenue par les conseillers de la République. Par contre les critères relatifs à la limitation de l’âge des candidats aux élections présidentielles et l’exigence d’un niveau d’instruction minimum ont été légèrement modifiés. Si le plafond d’âge est toujours maintenu à 70 ans pour les candidats à la présidence de la République et a complètement sauté pour les candidats à la députation, le plancher, lui a subi quelques modifications. Les conseillers ont retenu qu’il faut un âge minimum de 35 ans pour les candidats à la présidence de la République et 21 ans au moins pour les prétendants à l’assemblée nationale, sans limite d’âge maximum. Les candidats aux présidentielles sont astreints aussi à verser une caution de 10 millions FCFA, chacun et pour la députation, une participation aux frais électoraux s’élevant à 250.000FCFA par liste. En outre, la question d’un niveau minimum d’instruction a aussi soulevé des débats houleux au niveau de l’hémicycle. Les conseillers de la République retiendront à ce propos un niveau d’instruction équivalent au Baccalauréat plus trois ans ou équivalent pour la présidence de la République et un minimum de BEPC ou de son équivalent pour les candidats à la députation.
Toutefois, la préoccupation soulevée par certains conseillers a été compensée par l’introduction d’un quota au niveau de l’Assemblée nationale. ‘’Les listes des partis politiques ou celles des candidats indépendants doivent obligatoirement compter, au moins, 75 % des candidats titulaires du BEPC ou de son équivalent et 25% au plus de ceux ne remplissant pas cette condition’’, indique l’amendement du CNN. Dans ce quota, les circonscriptions spéciales sont intégrées dans les régions dont elles relèvent, vont préciser les conseillers du CCN. Par ailleurs à la liste des inéligibles, sauf démission de leur part, se sont ajoutés les consuls généraux à côté des Ambassadeurs et les Directeurs généraux des sociétés. La durée du mandat initialement fixée à 4 ans est passée à 5 ans aux différents mandats électifs. Le CNDP fait son choix du président de la CENI Avant même l’adoption du nouveau code électoral, certaines de ces dispositions commencent à être appliquées.
En effet, l’avant projet du code électoral a introduit la consultation du Conseil National de Dialogue Politique (CNDP) avant la nomination du Président et vice président, Secrétaire Général et Secrétaire général adjoint de la CENI ; coordonnateur et son adjoint du comité national de gestion du fichier électoral. La désignation du nouveau Président de la CENI a été soumise à cet exercice. Le CCN saisi des candidatures pour statuer a jugé que la question ne relève pas de ses compétences. Le CNDP sera alors convoqué pour se prononcer sur trois candidatures soumises à son appréciation. Trois Curriculum vitae, à savoir ceux de Me Aissata Zada, vice présidente démissionnaire de la dernière CENI, du magistrat Abdourahmane Ghousmane et du Magistrat Abdou Dan Galou seront examinés par les participants à la session du CNDP du dimanche 22 mai 2010. Finalement, faute de consensus, Abdourahmane Ghousmane l’emportera après une séance de vote avec 25 voix contre 15 pour Me Aïssata Zada et 2 pour Abdou Dan Galou.
La Commission électorale nationale indépendante (CENI) aura en charge l’organisation des élections présidentielles, législatives et municipales sous la transition qui doit s’achever en mars 2011. En attendant la confirmation par décret de la nomination du président de la CENI, le nouveau code électoral a été remis en main propre par le Président du CCN Marou Amadou au Premier Ministre Mahamadou Danda qui lui-même l’a transmis au CSRD. Des sources proches de la junte indiquent que ce code ne subira pas de changements significatifs auprès de la junte. Toutefois fois, l’une des principales lois organiques, le code électoral doit être soumis pour contrôle de conformité à la Constitution. Celle-ci n’étant pas disponible et devant suivre le même circuit que le code électoral, c’est-à-dire l’étape du CCN puis celle du gouvernement et du CSRD, l’on se demande alors à quand l’adoption de ce code et la mise en place de la CENI initialement prévue le 8 juin prochain. Ce qui est sûr, le délai imparti au Comité des Textes Fondamentaux s’achèvera en principe, aux termes de ces 45 jours de travaux, au plus tard le 5 juin. Et l’on estime que c’est à partir de cette date que les choses s’accéléreront quand le fond de la Constitution sera connu, amendé et adopté.
                                                                                                Écrit par Laoual Sallaou Ismaël (Roue de l’Histoire n° 509 du 26 mai 2010)

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