NTERVIEW EXCLUSIVE DU GÉNÉRAL DE CORPS D'ARMÉE DJIBO SALOU



«L'exercice du pouvoir n'est jamais chose aisée, surtout dans le contexte qui est le nôtre et qui était fait d'urgences, de priorités multiples, de difficultés de trésorerie, de défiance de la communauté internationale », déclare le Chef de l'Etat


18 février 2010, 28 mai 2010, le CSRD a aujourd'hui 100 jours au pouvoir. Monsieur le Président, c'est un rappel, vous avez  demandé, le 18 février dernier, à la population  nigérienne de garder son calme et de rester unie autour des idéaux qui animent le CSRD et qui pourront faire du Niger un exemple de démocratie et de bonne gouvernance. Vous avez également pris l'engagement  patriotique de sauver le Niger et sa population de la pauvreté, du mensonge et de la corruption. Aujourd'hui, trois mois  après, quels sont les grands enseignements que vous avez retenus de l'exercice du pouvoir ?


L'exercice du pouvoir n'est jamais chose aisée, surtout dans le contexte qui est le nôtre et qui est fait d'urgences, de priorités multiples, de difficultés de trésorerie, d'exigences de la communauté internationale, tout cela dans un environnement marqué par la pauvreté et une crise alimentaire sévère.  A cela il faut ajouter les attentes des populations nigériennes tant au plan économique que politique. Au total donc, nous avons dû faire face à une situation nationale complexe qui exigeait de nous tous, un esprit de décision et de responsabilité. Ce sont là les principaux enseignements, mais pas les seuls, que nous retenons de l'exercice du pouvoir d'Etat au cours de ce trimestre.
A l'issue de la période de transition, un pouvoir démocratiquement élu prendra les rênes du pouvoir. Quelles sont vos attentes par rapport à la classe politique ?

Notre vœu en la matière est que cette classe politique prenne véritablement conscience des enjeux majeurs du Niger et qu'elle œuvre pour l'enracinement de la démocratie dans notre pays, ce qui reste en fin de compte la base essentielle sur laquelle nos populations peuvent prospérer et amorcer un développement socio-économique effectif, dans la stabilité, la paix et la quiétude sociale. En somme, elle doit faire preuve de patriotisme tout simplement. Quant à nos Forces de Défense et de Sécurité, je crois ne pas me tromper en disant qu'elles ont démontré à maintes reprises qu'elles sont véritablement républicaines. Elles n'investissent pas le champ politique par caprice ou par goût du pouvoir. Chaque fois qu'elles ont dû le faire, à leur corps défendant, c'est en dernier recours pour éviter à notre pays des catastrophes certaines. C'est-à-dire que la classe politique doit jouer pleinement son rôle et accepter en toutes circonstances, les exigences de la démocratie.

Vous avez dit et je cite : « Les Forces de Défense et de Sécurité nigériennes n'ont nullement vocation à intervenir sur la scène politique et cela doit être définitivement compris par tous. Elles se dresseront toujours contre l'arbitraire, contre les menaces à l'unité et à la cohésion nationales ».  Est-ce à dire Monsieur le Président, que le temps du renversement des pouvoirs civils par l'Armée est à jamais révolu au Niger?

Cela ne tient qu'à la qualité de la gouvernance des affaires publiques. Si les textes fondamentaux qui régissent cette gouvernance sont respectés, si les institutions républicaines fonctionnent normalement et si les intérêts du pays sont défendus et préservés, pourquoi voulez-vous que l'Armée se mêle de ces questions politiques ? Mais à titre personnel, je souhaite  sincèrement qu'elle ne soit plus contrainte d'être l'ultime recours.

Dès le lendemain des événements du 18 février 2010, le CSRD a pris un engagement solennel en signant  l'Ordonnance N°2010-03, qui dispose clairement que les personnels des Forces de Défense et de Sécurité, le Premier ministre et les ministres du gouvernement de Transition sont inéligibles aux élections qui seront organisées pendant la période de transition et ce, sans aucune dérogation possible à ladite ordonnance. Après trois mois d'exercice effectif du pouvoir d'Etat, est ce que les dispositions de cette ordonnance sont toujours inviolables ?


Evidemment ! Il s'agit-là d'un engagement formel et irréversible, que nous faisons sur l'honneur.

Monsieur le Président, les grandes priorités du CSRD sont entre autres : la restauration de la Démocratie et de l'Etat de droit,  l'assainissement de la situation socioéconomique et politique, la réconciliation des Nigériens. Il y a aussi la mise en œuvre urgente de tous les moyens pour faire face à la crise alimentaire que le pays connait. Quel bilan peut-on tirer aujourd'hui de la mise en œuvre de ce programme prioritaire?


Comme chacun a pu le constater, nous avons engagé le processus des réformes institutionnelles qui est en bonne voie puisque les différents organes de la transition en charge de ce volet sont à pied d'œuvre et poursuivent leur travail sans difficultés majeures. La Commission de lutte contre la délinquance économique, financière et fiscale a été installée et s'attèle à son cahier de charges. Le gouvernement, appuyé par les partenaires techniques et financiers  a pris en main la résolution de la crise alimentaire. Il me semble que, sans essayer de faire un bilan à ce stade, ce qui serait prématuré, on peut considérer que notre programme se déroule normalement. Il reste évidemment beaucoup à faire, mais je ne doute pas que le CSRD et le gouvernement seront à la hauteur des enjeux.

Monsieur le Président, le CSRD a décidé de vous élever au grade le plus élevé dans la hiérarchie militaire de notre pays. Quelle signification peut-on donner à cet acte ?

Je ne suis pas le mieux placé pour répondre à cette question parce que je n'ai rien demandé à personne. Les membres du CSRD et des Forces de Défense et de Sécurité ont estimé que je le méritais. Je leur en suis reconnaissant.
                                                                                                                                     Écrit par Saidou Daoura (Sahel Dimanche) 

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